CHAPITRE
9 :
a Sujet
1 : Principes, contraintes et
limites des politiques monétaires aujourd'hui.
*
Proposition
de corrigé (attention : en France, avant 1999,
c'est-à-dire avant l'UEM) :
*
Introduction
:
Les années 80 ont connu une
profonde mutation des systèmes financiers, en France
comme ailleurs, que l'on peut rapidement caractériser
par un double mouvement de déréglementation
et de libéralisation. L'environnement international
fut également le lieu de transformations dans le
domaine monétaire et financier : ouverture des marchés,
libéralisation totale des mouvements de capitaux,
internationalisation bancaire, etc. Dans ces conditions,
les politiques monétaires actives, d'inspiration
keynésienne, devinrent beaucoup plus difficiles à
mettre en oeuvre, d'autant plus que le problème de
l'inflation demeurait et que les effets conjoncturels des
politiques monétaires traditionnelles s'amenuisaient.
A la suite de cela, aujourd'hui, sous l'influence du courant
monétariste, la politique monétaire est plutôt
passive. Il s'agit, avant tout, de combattre l'inflation
; en aucun cas, de relancer la machine économique.
Nous présenterons, dans un premier temps, ce fondement
monétariste des politiques monétaires actuelles.
Mais l'acceptation très générale de
ces principes ne doit cependant pas conduire à penser
qu'ils s'appliquent sans aucune difficulté ; les
contraintes et les limites sont nombreuses ; leur analyse
fera l'objet d'une deuxième partie.
I - Le fondement monétariste des politiques monétaires
actuelles :
Les politiques monétaires actuelles
s'appuient sur une dénonciation des politiques conjoncturelles
keynésiennes, considérées comme étant
à l'origine de la stagflation. Le remède,
à quelques nuances près, ne peut être
qu'une politique monétaire orthodoxe dont l'objectif
unique est la stabilité des prix. Tels sont les points
que nous allons développer.
Aux origines de la stagflation - situation
caractérisée par la présence simultanée
de la stagnation économique et de l'inflation - on
trouve toujours une politique monétaire active, censée
restaurer le plein emploi. Conformément à
la critique par Friedman de la relation de Phillips, à
l'effet temporaire de relance à court terme succède
l'inflation d'origine monétaire. Il s'en suit des
perturbations diverses au sein du système économique
dont une hausse des salaires réels, des anticipations
et des décisions erronées ; d'où une
réduction de la production et de l'emploi avec persistance
de l'inflation.
Le seul remède efficace consiste
à suivre une politique monétaire orthodoxe
que l'on peut résumer de la manière suivante.
L'État devenu libéral, c'est-à-dire
non interventionniste, se focalise sur la stabilité
monétaire et mène alors des politiques restrictives
et stables. Cela conduit à la fin de l'inflation
d'origine monétaire et à l'assainissement
de l'économie.
L'objectif unique, de la politique
monétaire est la stabilité des prix. En tant
que telle, la stabilité des prix est un objectif
final qui ne peut pas être directement atteint par
la politique monétaire. Pour la rendre opérationnelle,
on lui substitue des objectifs intermédiaires qui
correspondent à des variables monétaires qu'elle
peut influencer ; ces dernières étant corrélées
avec l'objectif final. Atteindre les objectifs intermédiaires
permet ainsi d'atteindre efficacement et de manière
mesurable l'objectif final. Ces objectifs intermédiaires
sont actuellement au nombre de deux : stabilité du
taux de change et contrôle de la masse monétaire
M3. La recherche du premier objectif s'inscrit dans le cadre
de la participation de la France au SME. Il est un des éléments
de la stratégie de "désinflation compétitive"
: un taux de change stable et fort a des effets favorables
sur la valeur interne de la monnaie car il évite
d'importer l'inflation extérieure et contribue, de
ce fait, à la stabilité des prix ; en outre,
l'effet défavorable sur les exportations est compensé
à la fois par cette compression des prix des produits
importés entrant dans la fabrication des produits
exportés et par les gains de productivité
destinés à compenser le désavantage
initial. La modération des hausses de salaire dans
un climat désinflationniste y contribue également.
C'est ce que l'on a appelé "le cercle vertueux
allemand". Le contrôle de l'agrégat monétaire
M3 est une forme d'action conforme au modèle néo-quantitativiste
du monétarisme. Elle permet : de mesurer la liquidité
de l'économie et indirectement le crédit,
d'annoncer clairement les objectifs publics en matière
de hausse des prix et donc de maîtriser la formation
des anticipations inflationnistes, de renforcer la crédibilité
des autorités monétaires et plus particulièrement
d'affirmer l'indépendance de la banque centrale,
d'intervenir en phase avec les autres membres du G7 qui
utilisent tous cet objectif intermédiaire.
II - Contraintes et limites :
Ces principes se sont révélés,
en pratique, plus difficiles à appliquer que le pensaient
les monétaristes. A la contrainte structurelle du
système financier se sont ajoutés les contraintes
de l'environnement international et des limites techniques.
Certains ont même remis en cause le modèle
monétariste.
La politique monétaire en économie
d'endettement est différente de la politique monétaire
en économie de marché. Les nouvelles caractéristiques
du système financier autorisent l'utilisation de
certains instruments et en interdisent d'autres. Ainsi,
alors qu'aujourd'hui l'économie d'endettement laisse
la place à l'économie de marchés financiers
- les mécanismes de marché remplaçant
des procédures administrées - il n'est plus
possible de faire appel à un contrôle quantitatif
du type de l'encadrement du crédit ou du contrôle
des changes, pas plus qu'à la manipulation du taux
de réescompte. Conformément à la théorie
de la base qui inspire les monétaristes, les seuls
instruments efficaces sont : la politique d'open market
et la fixation du taux des réserves obligatoires,
éventuellement une action directe par les taux d'intérêt.
Encore faut-il que le régime de change soit flexible,
sinon aucune politique indépendante n'est possible.
Ce n'est pas la seule contrainte d'ordre international.
Deux autres contraintes internationales
sont aujourd'hui très fortes. L'une découle
de la convertibilité totale des monnaies et de la
liberté des mouvements de capitaux, interdisant tout
contrôle des changes ; l'autre provient de la participation
de la France au SME qui oblige à maintenir des taux
de change fixes et stables. Cette dernière contrainte
est renforcée par les perspectives de monnaie unique
dans le cadre de l'Union économique et monétaire.
L'objectif du taux de change est désormais privilégié.
Cette stabilité externe de la monnaie est obtenue
à la fois par la stabilité interne - réduction
du différentiel d'inflation - et par l'ajustement
des taux d'intérêt à un niveau au moins
égal à celui des autres pays. Par un effet
en retour, la stabilité externe contribue à
l'amélioration de la stabilité interne : mimétisme
par rapport à un pays vertueux, disparition de la
prime de risque, etc. Les marges de manoeuvre de la politique
monétaire sont donc singulièrement réduites
par les contraints internationales. S'y ajoutent des limites
techniques.
Finalement, deux instruments seulement
sont disponibles : le taux d'intérêt et le
coefficient de réserves obligatoires ; l'action directe
sur la base monétaire est écartée car
on considère qu'elle serait de nature à susciter
de trop fortes fluctuations des niveaux des taux d'intérêt.
Comme les réserves obligatoires sont plutôt
utilisées pour atténuer les effets des mesures
restrictives, il ne reste que le taux d'intérêt.
Quand on sait le poids que les contraintes internationales
font peser sur cet instrument, on mesure le faible degré
de liberté laissé à l'initiative des
autorités monétaires. En outre, les agrégats
monétaires, du type de M3, qui servent de référence
pour contrôler l'exécution des objectifs ont
cessé d'être pertinent, en France comme à
l'étranger. La politique monétaire ressemble
de plus en plus à un navire n'ayant pas de capitaine
à bord et dont la boussole est déréglée.
Ces contraintes et ces limites techniques
n'ont pourtant pas nuit à l'efficacité. Il
faut bien reconnaître que l'inflation a disparu de
la plupart des grands pays industrialisés. Mais,
la médecine appliquée n'a pas été
sans effets secondaires ; le chômage a continué
à se développer malgré les prétentions
monétaristes. Au point qu'aujourd'hui ce sont les
fondements même de ces politiques monétaires
qui sont discutés. Une telle politique ne bute pas
seulement sur des limites, elle aurait atteint ses propres
limites.
*
Conclusion
:
La politique monétaire aujourd'hui
est fondée sur des principes monétaristes
qui lui assignent un seul objectif : la stabilité
des prix. Les contraintes structurelles provenant des caractéristiques
du système financier, les contraintes internationales
ainsi que les limites techniques des instruments utilisés
ont sans doute réduit son efficacité, mais
ne l'ont pas empêché d'atteindre largement
son objectif. Est-ce alors la fin de la politique monétaire
ou le signe de son nécessaire renouvellement ?
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